Star Wars : la guerre contre les Vong
Je viens enfin de terminer la monumentale série du « Nouvel Ordre Jedi » (une vingtaine de tomes, parus de 1999 à 2005) et qui relate des évènement se déroulant 20 ans après le Retour du Jedi. Une série étonnante, qui ne sera jamais adaptée au cinéma, car elle appartient à un univers « légendaire » Star Wars… (suite à la décision des nouveaux ayant droits).
En 1999, à peu prés au moment où sort la Menace Fantôme, un certain Robert Anthony Salvatore, surtout connu pour avoir rédigé de nombreux romans sur les Royaumes Oubliés (de la pure medieval fantasy) donne une grande claque à l’univers Star Wars et met en œuvre un engrenage qui va chambouler complètement la galaxie lointaine, très lointaine. Son roman Vecteur Prime est violent, dérangeant, et crée de toutes pièces une nouvelle galerie de Méchants (après les multiples tentatives de renaissance de l’Empire lors des précédents romans).
(attention je vais spoiler à partir de maintenant)
Dés le départ, la controverse…
Vector Prime tranche avec l’ambiance Star Wars telle que nous la connaissons, de part sa violence et sa cruauté. Avec l’accord de George Lucas, RA Salvatore va même jusqu’à sacrifier un personnage mythique, à savoir Chewbacca, et ceci dés le premier tome de la série. On imagine la consternation des fans ! Salvatore raconte d’ailleurs qu’il a reçu quantité de lettres d’insultes, voire de menaces de mort, sur le thème « touche pas au wookie » !
Dans une interview, Salvatore explique comment il en est venu à travailler sur l’univers Star Wars et à le dépoussiérer :
« On m’a demandé d’écrire Vecteur Prime en Août de l’année dernière. Au départ, j’ai rechigné à l’idée, parce que, bien que j’aimais les films, je n’avais pas lu les romans. L’éditeur m’a demandé de ne pas m’inquiéter à ce sujet , car ils étaient à la recherche d’une voix originale, et d’un nouveau départ pour la série plutôt que d’une simple continuation de ce qui avait précédé.[…] On m’a donné un aperçu général de l’arc de l’histoire pour la vingtaine de romans du Nouvel Ordre Jedi, avec une idée générale de ce à quoi la nouvelle menace pour la galaxie devait ressembler, et j’étais chargé d’utiliser ces informations et de mettre en place une trame pour le livre qui lancerait la série. Il y avait quelques contraintes, telles que le choix des personnages qui devaient être inclus (principalement ceux des films), les bases de la menace extraterrestre, et, oh oui, la mort de Chewbacca. Qui a fait cette dernière demande ? Cela sortait d’une réunion au Skywalker Ranch, m’a-t’on dit, entre les gens de la maison d’édition, Del Rey, les gens de chez Lucasfilm, et quelques auteurs des précédents Star Wars. Je ne sais pas de quelle manière George Lucas était impliqué dans cette décision. Je doute que ce fut sa décision explicite de tuer un personnage, mais je suis assez certain qu’il a donné son accord à l’acte et sur ce personnage particulier. »
De nouveaux méchants : les Vongs
Le grand mérite de cette nouvelle saga est d’avoir profondément changé la donne, en introduisant un nouveau groupe de méchants, à savoir les Yuzhan Vongs, des extraterrestres originaires d’une autre galaxie. Les Vongs possède toute une culture basée sur la guerre, et leur mode de vie tient en grande estime la souffrance et la mort. Ils sont adeptes de l’auto-mutilation et on peut dire que leurs valeurs sont à l’opposé de la pacifique Nouvelle République !
Autre caractéristique importante, les Vongs abhorrent la technologie sous toutes ses formes et utilisent la génétique et la biomécanique pour leurs propres besoins. Leurs vaisseaux, leurs maisons, leurs armes et même leurs vêtements sont des créatures vivantes. Et cela leur réussit plutôt bien ! Les Vongs mettront en déroute les forces de la République, et n’auront guère de mal à conquérir de nombreuses planètes, qu’ils vont terraformer à leur façon…
Pour finir, dernier point problématique pour Luke Skywalker et ses collègues Jedi : les Vongs sont invisibles dans la Force (alors que toutes les créatures vivantes de la galaxie en font partie). En conséquence, ils sont difficiles à battre, même pour des Jedi bien entraînés ! Cette curieuse particularité ne sera expliquée que dans les derniers tomes de la série…
Un univers de souffrance
La mort de Chewbacca ne fait qu’initier un cycle de violence et de souffrance dans la galaxie, et d’autres personnages sympathiques vont mourir au cours de la série, sans parler de ceux qui sont capturés par les Vongs et torturés… Pour du Star Wars, le ton est résolument noir, très noir, et le lecteur assiste impuissant à une succession de défaites et de massacres. Même Palpatine en deviendrait sympathique à côté de l’Empereur Vong, dont le déferlement de violence et de destruction et les idées fascistes (apologie de la race pure, destruction des faibles par les plus forts) sont complètement incompatibles avec la culture des Jedi et de la Nouvelle République. Impossible de discuter avec un ennemi pareil ! La seule possibilité est une lutte à mort, pour la survie…
Le pire est que ce sont les Vongs qui gagnent, du moins au début de la série ! Ils mettent à sac et ravagent des planètes entières, réduisent en esclavage leurs habitants (quand ils ne décident pas de les sacrifier à leurs divinités guerrières), ne font qu’une bouchée des défenses planétaires et des vaisseaux spatiaux. Rien ne semble les arrêter, et un point culminant est atteint quand les Vongs attaquent Coruscant et prennent d’assaut la capitale, après quoi ils lancent un processus de terraformation qui ravage complètement ce monde emblématique. Dur dur pour le lecteur !
Les Jedi en pleine déroute
Dans cet univers alternatif aux prochains films Star Wars à paraitre au cinéma, Luke est devenu un Maître Jedi incontesté, et il a réussi à reconstruire une académie Jedi et à rassembler plusieurs dizaines de chevaliers autour de lui. Il existe donc un Ordre Jedi ressuscité après les années sombres de l’Empire, et la relève semble être assurée à travers les enfant de Leia et Han Solo : les jumeaux Jacen et Jaina, et le petit dernier, prénommé Anakin en mémoire de son grand-père…
Au début des romans, les Jedi semblent êtres les seuls à même de pouvoir contenir l’avancée des Yuzhan Vongs, et pourtant la partie n’est pas gagnée… Tout d’abord, les Jedi se heurtent à l’hostilité des nouveaux dirigeants de la République, qui leur reprochent leurs choix stratégiques. Ensuite, il y a une véritable crise à l’intérieur de l’Ordre Jedi, entre les tenants d’une action offensive contre les Vongs (menée par Kip Durron, ancien disciple de Luke Skywalker) et les partisans du dialogue et d’une action purement défensive (approche choisie par Luke).
Un Jedi est-il un simple défenseur ou un guerrier au service de la République ? Doit-il détruire les Vongs ou chercher à les comprendre ? Choix difficile, qui remet en question les fondements de l’Ordre et qui aboutira à une refonte complète de ses valeurs (d’où le titre de la série : le Nouvel Ordre Jedi).
La fin justifie les moyens
Les Jedi et leurs alliés finissent par vaincre les Vong au prix de milliers de vie et de gros sacrifices. De nouvelles alliances sont forgées, dont une alliance avec l’Amiral Palleon, dernier représentant officiel des forces impériales ! Au cours de la guerre, une nouvelle génération de Jedi voit le jour, et Luke est relégué à l’arrière plan par ses successeurs (parmi eux Jacen et Jaina Solo, et son propre fils, Ben Skywalker). Ces nouveaux Jedi n’hésitent pas à mettre en œuvre de nouvelles stratégies, et ils faut bien avouer qu’ils réussissent mieux que leur aînés, légèrement dépassés par les évènements…
La défaite de l’Empereur Vong et de sa clique viendra finalement de l’intérieur et de la révolte d’une partie de son peuple (le système de castes n’est pas très appréciés par ceux qui se trouvent tout en bas). Avant cela, les Jedi auront éviter (de justesse) l’emploi d’armes de destruction massive et d’armes biologiques jugées peu morales…
En conclusion…
Le Nouvel Ordre Jedi est une série riche et inventive, qui verse souvent dans une violence jusque là peu développée dans l’univers Star Wars. C’est aussi une œuvre protéiforme, à cause de la multitude d’auteurs qui y ont participé et de la multitude de personnages (dont pas mal de nouveaux). Inévitablement, cela manque de cohérence et ça part un peu dans tous les sens, avec tantôt des histoires centrés sur les Jedi, tantôt sur les exploits des escadrons de pilotes (dont Jaina Solo est une digne représentante), tantôt des pérégrinations de Han Solo et de ses potes contrebandiers, etc… etc… L’avantage de ce système est que chaque lecteur y trouve son compte, l’inconvénient est que certains romans de la série vont apparaitre ennuyeux, voire frustrant lorsqu’on laisse de côté les péripéties et les mystères dévoilés dans le tome précédent !
Aurait-on pu adapter en l’état la série pour en faire un ou plusieurs films ? J’en doute, tant le sujet est complexe et prête à confusion (les incohérences sont d’ailleurs nombreuses entre les romans). Il aurait fallu tailler dans le vif ! Le problème est aussi que cette œuvre est pensée pour trancher par rapport à une multitude d’autres histoires Star Wars… que l’on a pas vu à l’écran ! Difficile alors de raconter l’histoire en l’absence de tout contexte, et en introduisant une multitude de personnages que les lecteurs connaissent bien mais que le grand public ignore complètement…
Faire table rase de la littérature Star Wars, qui est devenue une masse d’informations totalement ingérable, était sans doute la meilleure solution… Si les prochains films rencontrent le succès escompté, peut-être qu’on pourra voir certains éléments du « légendaire » prendre place dans les nombreux Spin-Off annoncés.