Rogue One : la guerre des nerds

Il y a quelque chose de très improbable et de quasi miraculeux dans Rogue One… C’est un film que personne n’attendait, basé sur une anecdote (comment les rebelles ont mis la main sur les plans de l’Étoile Noire), où il n’y a quasiment pas de jedis, et qui est destiné à rester sans suite (alors que c’est la mode des films à suite et des reboots). Bref personne n’aurait misé un crédit galactique sur ce genre de film, on dirait presque un fan film qui se serait retrouvé par hasard propulsé sur la scène internationale.

(Je préviens que je vais certainement Spoiler à partir d’ici)…

C’est certainement un film fait pour les fans de la première heure, et qui évite tous les écueils essuyés par JJ Abrams et la seconde trilogie lucasienne… Rogue One a des ambitions modestes, il n’est pas un nouveau chapitre de la saga Skywalker, et n’a pour but que de divertir et de faire plaisir aux fans, et notamment à ceux n’aiment pas les Jedi dans Star Wars (et il y en a pas mal). Ici, on se focalise sur des gens ordinaires, des héros de l’ombre qui jouent néanmoins un rôle décisif dans la chute de l’Empire. Une sale guerre, avec son lot de trahisons et de morts tragiques. Ainsi dés le début du film, le rebelle Cassian Andor assassine froidement un informateur pour ne pas laisser de traces derrière lui ! Un personnage bien ambivalent, qui se comporte au début comme un vulgaire assassin, avant de devenir sympathique (ce qui renvoie à l’évolution de Han Solo de l’épisode IV à l’épisode VI…)

Tout le film baigne d’ailleurs dans une ambiance sombre et oppressante, et la dictature impériale pèse de tout son poids quel que soit l’endroit où l’on se trouve dans la galaxie (Disney aurait d’ailleurs demandé au réalisateur de retourner une partie de son film, jugé trop sombre). Même si aucune goutte de sang n’est versée à l’écran, c’est quand même rude de voir une ville entière rayée de la carte, ou de croiser un valeureux résistant (Saw Gerrera / Forrest Withaker) réduit à l’état de mutilé de guerre… Une des grosses réussites de Rogue One est d’ailleurs de montrer de façon détaillée les effets cataclysmiques de l’Étoile Noire. On est loin de l’image de la planète Alderaan qui fait pschiit dans l’épisode IV, une destruction qui est terriblement abstraite et pas du tout effrayante.

Autre point intéressant, la volonté de faire de SF vintage et de coller à l’ambiance des épisodes IV et V. On retrouve les pupitres avec les gros boutons carrés dans l’Étoile Noire, les uniformes en plastique et même le look typiquement seventies des personnages (quasiment tous les résistants ont la moustache et les cheveux longs). Drôle d’ambiance retro, qui nous immerge d’autant plus dans l’univers, et crée une vrai proximité. Les trucages numériques se font discrets, et on a plus l’impression d’être dans un souk moyen-oriental que dans une épopée galactique. C’est de la SF un peu crade, plus proche de Riddick que de Interstellar, avec un côté série B bien assumé.

Alors qu’on pensait tout connaître de cette époque, les designers ont réussi à créer de nouveaux droïdes, de nouveaux troopers (armure noire ou sable), des vaisseaux surprenants, de nouveaux environnements, le tout dans un univers d’une cohérence absolue. C’est comme si on avait entrebâillé une porte de vaisseau dans l’épisode IV et découvert le vaste monde qui se cache de l’autre côté… De fait, ce film vient compenser l’austérité de l’épisode VII, sans verser dans la surenchère de bestioles à la Georges Lucas. Il y a plein de choses à voir et de petites trouvailles, plein de clins d’œil qui nécessitent plusieurs visionnages. Là où Lucas donnait de grands coups de coude au spectateur pour signaler un goodie, Gareth Edwards joue plutôt la carte de la subtilité. Si on est un gros fan, on s’amusera de croiser certains personnages bien connus et de détecter certaines références. Si on est un simple curieux, on pourra passer son chemin sans que cela nuise à la lisibilité de l’histoire….

Bref, pari tenu pour un bon film de guerre, avec moult péripéties, et qui reste très respectueux de l’univers Star Wars. Quelques défauts (minimes) :

  • Gareth Edwards est un bon réalisateur, mais il n’a pas de patte artistique particulière, il filme de façon très classique. Du coup il n’y a pas d’images iconiques comme on on peut en voir dans le reste de la saga.
  • Même si ce film est destiné à rester un standalone, était-il nécessaire de sacrifier tous les personnages ?
  • le film a été réécrit et modifié, ça se sent. Rien qu’entre le trailer et le résultat final, il y a des discordances. Résultat, des passages tronqués, des raccords parfois hasardeux…
  • On n’apprend rien de particulier sur l’Étoile Noire ! J’espérais qu’on verrait les coulisses de sa construction, et qu’on la visiterait de l’intérieur…

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