TRON l’héritage : la Map a changée
Résumé de l’épisode précédent
En 1982, Kevin Flynn (Jeff Bridges), programmeur de génie, veut se venger de son rival (Ed Dillinger) qui lui a piqué ses idées, l’a fait licencier, et a pris le contrôle de la société ENCOM. Aidé par d’anciens collègues (Alan et Lora), Flynn s’introduit en douce dans l’entreprise pour pirater la base de données et récupérer des preuves. Ce qu’il ne sait pas c’est que le système informatique est sous le contrôle d’une intelligence artificielle, le MCP (Master Control Program). Ce qu’il ne sait pas, c’est que des chercheurs de ENCOM ont mis au point un système de numérisation de la matière…
Ni une ni deux, Flynn est découpé en tranches par un laser (sans effet gore, on est chez Disney !) et se trouve transporté dans la Grille (l’ancêtre de la Matrice des frères Wachowski) où règne le MCP. Le voilà dans un monde où les programmes sont incarnés par des individus bizarrement vêtus et où le MCP fait régner sa loi. Heureusement il pourra compter sur l’aide de TRON (dont le nom est tiré d’une commande BASIC) un programme justicier développé par son pote Alan. Flynn découvre vite que comme il n’est pas un Programme mais un Concepteur, il est quasiment un dieu dans cet univers. Il libère donc la Grille de son tyran..
Dans la Grille, chaque programmeur possède un homologue Programme : TRON pour Alan, Yori pour Lora et CLU pour Flynn (au début du film). Il y a un triangle amoureux suggéré entre les 3 amis, triangle qui se retrouve aussi dans la Grille !
TRON 1982, c’était un concept complètement barré comme Disney savait les faire à l’époque. Le film a vieilli (surtout au niveau des effets visuels) mais demeure culte par ses blagues d’informaticiens « Positif, négatif, tu serais pas un bit ? » et son univers unique. Il y a aussi la célèbre course de moto et les combats de disques qui restent toujours trés impressionnants. Le graphisme général, n’est ma foi pas si mal pour l’époque, et le design en jette encore avec ses effets luminescents.
Au passage, un revisionnage de TRON montre combien les emprunts/hommages des frères Wachowski sont nombreux. On trouve par exemple dans TRON un programmeur du nom d’Anderson et l’open space de Matrix est le même que celui de la société ENCOM…
TRON : l’héritage
Kevin Flynn a géré quelques temps la société ENCOM mais a mystérieusement disparu en 1989. Son fils Sam, également informaticien, découvre une étrange machine dans la tanière secrète de son père, et se trouve transporté à son tour dans la Grille. Il devra lutter contre CLU, un programme inventé par son père pour « créer le système parfait ». Heureusement il sera aidé par Flynn, prisonnier de la Grille depuis 20 ans et par la belle et énigmatique Quorra.
« Qu’est qui change dans ce nouveau système d’exploitation ? » « Le numéro sur la boite ! »
Les détracteurs de TRON 2 pourront se servir de ce dialogue au début du film pour affirmer qu’il s’agit d’un remake inutile. Par certains côtés, c’est vrai qu’il y a des redites: une IA tyrannique, des courses de moto, des batailles de disque… Mais il n’y a pas que cela, heureusement !
Tout d’abord la réalisation et les effets visuels sont vraiment réussis (en même temps, il n’y a pas de mal à surpasser ceux de 1982). Après une introduction résumant ce que Flynn a fait après le premier film et comment la société ENCOM a évolué, le spectateur est replongé dans les années 1980, et dans le TRON initial, par une visite de la salle de jeux de Flynn et l’écoute de tubes d’époque (Sweet Dreams de Eurythmics par exemple). Jusque là tout le film est en 2D : ce n’est que lorsque Sam Flynn est transporté dans la Grille que nous pouvons bénéficier de la 3D et d’un festival d’images numériques.
La Grille version 2010 est plus complexe (plusieurs niveaux dans les map), plus sombre, plus inquiétante. C’est un monde qui ne ressemble à aucun autre (si ce n’est peut-être certains décors de Star Wars) et qui est immédiatement envoutant. Il ne fait pas bon vivre dans ce monde-là, froid et incolore, littéralement déshumanisé. Les programmes passent le temps en assistant à des jeux meurtriers et en faisant la bringue dans des boites de nuit louches. Pas très palpitant tout ça ! Heureusement, les décors et costumes (très sexy pour les filles) ont bien évolué (mais les programmes ne font pas l’amour, on est toujours chez Disney !). Il faut aussi souligner combien la musique de Daft Punk est réussie et colle bien au sujet. Daft Punk + TRON c’est une évidence totale, à croire qu’ils s’étaient préparé toute leur vie pour ce moment.
Le réalisateur (Joseph Kosinski) a choisi de laisser le côté informatique et de ne pas jouer avec la façon dont des programmes ou des données peuvent s’incarner (prenant ainsi le contrepied de Matrix). On ne verra donc pas de bits, ni de mares de données et on peut oublier les blagues de programmeurs. TRON 2010 est plus axé sur l’action, ce qui n’empêche pas d’évoquer certains aspects philosophiques (de façon plus ou moins réussie)
(à partir de là, je vais spoiler un peu)
On trouvera ainsi le thème du créateur (Flynn) en confrontation avec sa créature (CLU, le même qui était déjà au service de Flynn dans TRON 1982). A noter la performance technique qui a permis de rajeunir Jeff Bridges pour tenir le rôle de CLU (sauf qu’ils ont oublié de lui faire les fossettes).
Flynn est complètement dépassé par la façon dont la Grille a évolué, il est devenu un vieil homme peureux, rien à voir avec le petit malin du film de 1982. Ce qui est troublant c’est que Flynn possède toujours les pouvoirs d’un Concepteur, ce qui lui permettrait en théorie de ramener vite fait bien fait CLU dans le droit chemin. L’explication de ceci est peut-être qu’il n’ose pas affronter CLU, son autre lui-même, de peut d’être détruit avec lui. On peut-être est-il fatigué de faire la guerre et de perdre bataille sur bataille (on ne sait pas ce qui s’est passé avant l’arrivée de son fils). Il jouera le rôle d’un mentor, tendance Obi Wan Kenobi ou Gandalf, laissant le héros accomplir son destin.
Il y a ensuite le cas Quorra : cette mignonne créature est une ISO (Isomorphic Algorithm), une intelligence apparue spontanément dans la Grille et de façon totalement imprévue. Flynn n’est donc plus vraiment le Dieu de cet univers ! La question est d’où viennent les ISO ? Ont-ils été créés par un « vrai Dieu » ou sont-ils apparus d’eux-même ? Ce n’est pas sans rappeler la façon dont le MCP de TRON 1982 a évolué tout seul jusqu’à devenir une intelligence supérieure (et tyrannique). Malheureusement l’histoire des ISO est très peu développée dans le film.
Pour finir, il faut parler du programme TRON, qui est bien présent dans le film mais réduit à quelques apparitions, et dont le rôle n’est pas sans rappeler celui d’un Dark Vador, asservi par un empereur despotique. Le personnage de TRON et son « basculement du côté obscur » sont très mal exploité dans le film, on devine qu’il rebascule dans le « côté lumineux » à la toute fin du film (les lumières de sa combinaison repassent au bleu) mais on en saura pas plus.
Conclusion
TRON 2010 est un film très bien réalisé, mais qui ne va pas au bout de ses concepts et laisse quelque peu sur sa faim. On ne peut pas parler de déception, mais j’aurais aimé que cet univers soit un peu plus détaillé et que les personnages soient un peu plus approfondis ! Peut-être que ces teasing sont réservé à un éventuel TRON 3, voire à une série TV qui parlerait de la Grille plus en détail. La fin de TRON 2010 est une fin ouverte, qui laisse le champ à de nombreuses possibilités. Flynn est-il mort ou a-t’il rebooté le système ? Sam va-t’il prendre en main la Grille depuis l’extérieur ?
Un autre thème important est la possibilité de transporter des entités numériques vers le monde réel (but visé par CLU et accompli par Quorra). On peut donc imaginer une invasion de programmes dans notre monde à nous, ou une guerre qui se déroulerait sur plusieurs fronts…
Bref TRON 2010, ça donne envie d’en savoir plus et c’est un vrai plaisir de cinéma. Pas mal pour une suite qui était honnie par tous les fans avant même sa sortie !