La Bataille des Cinq Armées : la fin du voyage

Dernier film inspiré de JRR Tolkien (pour le moment), et dernière incursion de Peter Jackson en Terre du Milieu, la Bataille des Cinq Armées m’a laissé un petit goût amer dans la bouche. Sans doute que j’en attendais trop, moi le fan de Tolkien depuis plus de trente ans, moi qui ai dévoré les romans, les films et mêmes les jeux vidéo. D’une manière générale, même si j’ai passé de bons moments, ce Hobbit-là est un cran en-dessous du Seigneur des Anneaux en film et ce n’est pas l’adaptation que j’espérais… La faute à trop d’incohérence et de défauts de mise en scène.

Une géographie fantaisiste

En tant que fan de Tolkien, un point qui m’a agacé est la liberté prise par rapport à la géographie et aux distances parcourues, bien que le premier Hobbit ait présenté une belle carte. A quoi bon présenter une carte si c’est pour l’ignorer complètement et laisser les personnages se téléporter comme bon leur semble ! C’était d’autant plus dommage, qu’on ressent bien pour Thorin et Cie le challenge qui consiste à traverser la moitié du pays pour se rendre à Erebor, et ceci dans un temps imparti.

Alors que la troupe de Nains galère comme c’est pas permis, nous avons Gandalf qui se téléporte en Rhudaur puis à Dol Guldur,  Radagast qui se téléporte prés de Fontcombe, Legolas qui se téléporte à Gundabad, et ainsi de suite… J’ai placé quelques pointeurs sur les lieux visités par les différents personnages. On voit bien que les distances sont parfois énormes, et qu’il y a des erreurs d’orientation manifeste (comme quand dans le film Legolas part au Nord pour enquêter sur Gundabad, ou quand son papounet l’incite à aller également au Nord chercher Aragorn… Lol)

On me rétorquera que les Magiciens et les Sages ont probablement des super-pouvoirs qui leur permettent de s’affranchir des distances. Mais pour moi ce n’est pas rien, car une partie du SDA et du Hobbit repose sur la notion de voyage périlleux, un trajet difficile et semé d’embûches qui ne se fait pas à la légère et dont on ne sort pas toujours indemne. A la base, le monde de Tolkien est en effet traité de façon réaliste, c’est même sa marque de fabrique. Pour aller d’un point A à un point B, il faut marcher des jours et des jours, on n’est pas dans un jeu vidéo…

Dragonball Z à Dol Guldur

Là je dois parler d’un des passages que j’attendais avec le plus d’impatience et qui m’a le plus déçu. Peter Jackson a vendu aux fans de Tolkien le fait qu’il puiserait dans les annexes et autres textes pour présenter des séquences à peine esquissées par Tolkien, et qu’il pourrait ainsi raccorder les deux trilogies. Parmi ces séquences, l’une d’elle est celle où le Conseil Blanc chasse Sauron de Dol Guldur. C’est un passage qui fait quelques lignes de texte chez Tolkien, et qui parle d’un assaut des Sages sur la forteresse de Sauron. Dans mon esprit, on aurait droit à une véritable armée attaquant Dol Guldur, avec Saroumane en chef de guerre, assisté par ses collègues magiciens, et par Elrond et Galadriel. Une coalition entre les Elfes de Lothlorien et les Elfes de Fontcombe aurait été logique à ce stade et cela aurait été l’occasion de reproduire les grandes batailles des ages passés.

A la place, nous avons trois boss (Galadriel, Saroumane et Elrond) qui rentrent dans le tas et combattent Sauron et ses mini-boss à coup de kung-fu et de super-pouvoirs. Un déferlement d’action digne d’un jeu vidéo et pas du tout subtil. Alors que je m’attendais à une attaque coordonnée, avec Saroumane donnant libre cours à ses stratagèmes et ses ruses (souvenez-vous de son utilisation de poudre à canon au Goufre de Helm) , j’ai eu l’impression de voir un combat de super mutants à la Marvel.

Même si j’ai bien pris mon pied à voir Elrond, Saroumane et Galadriel en action, j’ai trouvé que la scène avait quelque chose de bâclé et paresseux, pas du tout satisfaisant du point de vue scénaristique. J’imagine que PJ n’a pas voulu proposer deux grandes batailles dans son film…

C’est pas ma guerre

Le plat de résistance du film, c’est évidemment la bataille entre Humains, Nains, Elfes et Gobelins (et Wargs si l’on se réfère au roman) devant le Mont Solitaire. Un moment très prometteur sur le papier, et certainement très attendu par Peter Jackson car il va négliger les autres chapitres du récit au profil de sa bataille (je pense par exemple à la mort de Smaug qui est expédiée en quelques minutes au début du film).

Il est certain que l’affrontement des armées de différentes nations est impressionnant sur écran, mais il manque hélas du souffle et des éléments de surprise. La Bataille des cinq Armées souffre de la comparaison avec la grande bataille aux portes du Gondor, dans le Retour du Roi. En effet, lors de cette dernière, il y avait une succession de scènes fortes et de rebondissements, qui rythmaient la bataille et la rendaient palpitante…. Le bombardement du Gondor, l’attaque aérienne des Nazgûls, l’arrivée inespérée des cavaliers de Rohan, puis l’attaque des éléphants de guerre, et pour finir le renversement de situation opéré par l’Armée des morts menée par Aragorn…. Rien de tout cela dans le Hobbit, le seul élément de surprise est celui des Aigles et de Beorn (malheureusement à peine visible dans le film, alors qu’il arrive à retourner la situation à lui tout seul dans le roman).

Les enjeux de la bataille sont également assez mal posés, du point de vue de l’ennemi en tout cas. A plusieurs reprises on nous affirme que Erebor est un point de contrôle stratégique, convoité par Sauron… C’est vrai si l’on se place dans la perspective du contrôle des territoires nordiques mais on retombe sur le même problème géographique que j’ai cité. En effet, je veux bien concéder que depuis Erebor on peut s’en prendre à la Lothlorien… Par contre dire que de là on peut attaquer Fontcombe et le Gondor, c’est n’importe quoi ! Autant dire que la Finlande est un point stratégique pour attaquer l’Espagne…

Et encore…

Il y aurait encore beaucoup de choses à dire (et il existe de nombreux articles et forum où les gens sont du même avis que moi)… La réalisation de Peter Jackson est souvent magnifique mais elle est aussi plombée par des défauts énervants.

Bref, Peter Jackson  a réussi à réaliser de bons moments d’émotion, mais il s’est laissé emporté par son côté Geek et sa tendance à en faire toujours trop. Il cède également à la facilité pour satisfaire un public plutôt adepte de jeux vidéos et de mangas, que de littérature fantastique (évidemment, ça doit être aussi le point de vue de Warner, il faut que le film soit rentable). Il est clair que ce n’est pas le film qui va réconcilier les fans de Tolkien avec Peter Jackson !

Au final, le Hobbit est une série de films divertissants mais un peu boursouflée et souvent en manque de créativité (beaucoup de passages sont des copies de scènes du SDA). Beaucoup de scènes que j’attendais ont été bâclées alors que d’autres scènes sans intérêt scénaristique s’étirent interminablement…

Franchement, je regrette beaucoup que Guillermo del Toro n’ait pas pu réaliser la trilogie, le style en aurait été tout autre. Peut-être que si un projet de préquelle de préquelle se monte un jour ? (Le Silmarillion, la Guerre des Anneaux, le royaume d’Angmar, la Chute de Nùmenor…. il y a du choix !)

Résumé
auteur
Guillaume
date
2014-12-15
élément noté
La bataille des cinq armées
note
2